• Séance du 6 mai 2021

    Ecrire un conte...

    Avec un lieu, un héros, une quête

     

    La petite fille était seule à la maison. Son papa et sa maman, étaient partis tôt au travail. Aujourd’hui était un grand jour, elle irait à l’école seule pour la première fois. C’était enfin l’heure du départ. Elle sortit et claqua bien la porte qui se referma sans qu’elle eût besoin d’une clé. Elle avait pris soin de prendre son cartable et son goûter. Comme le ciel menaçait elle avait aussi pris son parapluie. Chemin faisant elle se répétait les conseils de sa maman : « Surtout, reste sur le trottoir, ne parle pas à des inconnus, attends bien que le feu passe au rouge, que les voitures soient arrêtées et que le petit bonhomme soit vert pour traverser… ». Elle devait passer devant le théâtre pour tourner à droite juste après. Elle avait déjà fait ce trajet des dizaines de fois. Elle le connaissait bien. Mais aujourd’hui personne ne lui tenait la main pour l’accompagner. Après quelques minutes de marche, elle fût stoppée par la police. Il y avait un incendie et des camions de pompiers arrivaient à toute allure, sirènes hurlantes comme pour dire « oust, dégagez, laissez-nous passer » La rue était bloquée et le policier qui barrait le passage ne rigolait pas. Il avait une tête de bouledogue et lui avait aboyé dessus, l’obligeant à tourner dans une ruelle qu’elle ne connaissait pas, pour contourner le feu.  Il était resté sourd à ses yeux rougis et à sa détresse. Il n’avait pas voulu entendre qu’elle devait aller à son école juste après le théâtre. « Mais petite, c’est là qu’est le feu, tu ne peux pas passer ! »  Une vieille dame desséchée qui observait la scène ajouta d’un air pincé « Jeune fille il faut toujours écouter la police … » Elle ne pouvait pas faire demi-tour pour rentrer chez elle, faute de clé et s’engagea à contre cœur dans la ruelle encore vide à cette heure.  Comme si ce n’était pas suffisant, voilà qu’il pleuvait. Elle ouvrit son parapluie et se retourna comme pour vérifier qu’elle ne faisait pas un cauchemar. Elle espérait se réveiller dans son lit. Mais elle entendait toujours les camions rouges passer à toute allure dans un terrible vacarme. Elle voyait encore la vieille dame vissée à la même place, un parapluie rouge à points blanc sur la tête, telle une grosse et mauvaise amanite qui contemplaient le spectacle.  Et elle pensa qu’elle allait rester là longtemps encore car personne n’a envie de cueillir une amanite.

     

    Sans comprendre ce qui lui arrivait, elle chuta dans le vide perdant tout point de repère. Le sol s’était dérobé sous ses pieds. Et voilà que dans un grand « splash » elle se retrouvait portée par son parapluie, voguant sur des flots calmes mais nauséabonds. Tout était noir et elle mît quelques instants à voir dans cette pénombre, qu’elle était tombée dans un égout ! C’en était trop, elle ne pût retenir de gros sanglots qui coulèrent sur ses joues.

     

    « Pourquoi tu pleures ? »

     

    Surprise elle chercha d’où venait cette voix et vit à côté d’elle, allongé paisiblement sur le dos, la patte arrière gauche sur la droite et ses deux pattes avant sous sa tête, un jeune rat.

     

    « Bonjour je m’appelle Rat Dégouille et toi… »

     

    « Ma maman m’a dit de ne pas parler à des inconnus, snif, snif, snif… »

     

    « Mais je ne suis plus un inconnu, je me suis présenté »

     

    « Je m’appelle Léane, snif et je dois aller à l’école Paul Bert, mais je suis perdue et je ne sais pas comment sortir d’ici, snif, snif… »

     

    « Rien de plus facile, il suffit de se laisser porter et bientôt nous passerons juste dessous. C’est un endroit que j’aime bien, surtout la cantine où je trouve toujours de quoi manger » Ils passèrent ensuite sous le théâtre en feu où toute l’eau déversée par les pompiers pour éteindre l’incendie retombait inévitablement à l’égout. Chargée de cendres noires, elle venait gonfler l’écoulement habituel du boyau. On aurait dit qu’elle cherchait à reproduire les immenses flammes qu’elle venait de combattre. Le courant augmentait et leur frêle esquif était de plus en plus chahuté par ces eaux nerveuses et grossissantes. Tous deux se tenaient fermement au manche du parapluie. Tant et si bien qu’il leur fut impossible de descendre le moment venu pour récupérer les escaliers qui menaient à l’école de Léane. Heureusement, quelques centaines de mètres plus loin des ouvriers avaient laissé tout leur matériel de chantier dont une barre de fer suspendue au-dessus du passage. Le manche du parapluie, en forme de sucre d’orge, se prit sur celle-ci et souleva parapluie, fillette et Rat d’Egouille comme l’aurait fait un télésiège aux sports d’hiver, les laissant bientôt suspendus au-dessus des flots, leur évitant une descente en rafting sur un torrent en furie. Ce fût le jeune rat qui offrit à Léane le moyen de descendre de leur perchoir, grâce à une vieille échelle en bois. Ils rebroussèrent chemin jusqu’aux escaliers qu’ils gravirent ensemble, mais au moment de franchir la trappe séparant l’égout de la cantine ils furent stoppés net par une présence, une vieille femme, bottes aux pieds, charlotte sur la tête, qui enfilait sa blouse. Léane s’écria « Madame Amanite ! »

     

    « Qui ? »  Demanda Rat d’Egouille

     

    « Ce serait trop long de t’expliquer, mais comment va-t-on faire pour entrer sans qu’elle nous voie ? »

     

    Sans attendre d’autres explications le jeune animal se faufila dans la cuisine de l’école et se planta entre les jambes de la cantinière qui le visage déformé par l’horreur, hurla « un RAATTT ! » Elle saisit un balai paille de riz qu’elle brandît et se mît à poursuivre l’animal. C’est ce moment que choisit la fillette pour se faufiler en hâte, traverser la cuisine et arriver dans la cour au moment où la cloche retentissait pour signifier aux enfants qu’il était l’heure d’entrer en classe. Léane se retourna une dernière fois et regarda en direction de la cantine où le balai dansait toujours derrière les vitres, une gigue endiablée. Le petit rat avait quitté la troupe et était planté dans la cour, regardant dans sa direction pour dire aurevoir à sa nouvelle amie, d’un petit signe de la patte.

     

    Léane se dit que dans la difficulté elle avait trouvé un véritable ami. Elle espérait le revoir bientôt…

     

     

     


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